« Un souffle de fraternité anime les sauveteurs », vient de déclarer Demirtas, le président du BDP, le parti pro kurde, en évoquant la vague de solidarité qui a submergé le pays pour les sinistrés de Van. Alors que ces dernières semaines, la fameuse « fraternité » (kardeslik) turco kurde prônée par l’AKP de Recep Tayyip Erdogan semblait de plus en plus résonner comme un slogan creux et que le pays paraissait à deux doigts de se fissurer gravement, ce sont les fissures de l’écorce terrestre qui révèlent ce qui fait son unité.
Il y a bien des imbéciles indécrottables pour voir une vengeance divine pour les soldats tués, dans la catastrophe qui vient de frapper une province majoritairement kurde et dirigée par le BDP. Cette pétasse de Müge Anlı par exemple. animatrice d!emissions debiles genre Perdus de vue…et qui se scandalise que « ces gens qui tuent des soldats et dont les enfants jettent des pierres sur la police demandent aujourd’hui de l’aide »
http://www.dailymotion.com/video/xlwb82_muge-anly-dan-van-depremi-ile-ilgili-yok-sozler_shortfilms
Mais ces racistes profonds ne font pas le poids face aux solidarités avec les populations sinistrées qui se manifestent dans tout le pays.
« Van ayakta, Turkiye ayakta » (Van debout la Turquie debout), » Türkiye Van için tek yürek » (la Turquie d’un seul cœur pour Van) etc…Le séisme du 23 octobre, a engendré un retournement des slogans criés lors des manifestations dans l’Ouest du pays, qui avaient suivi les attaques du PKK à Hakkari, la semaine dernière. Attaques révélatrices une guerre d’intensité de moins en moins basse entre le PKK et les forces de l’ordre. Aujourd’hui dans les médias, ces solidarités éclipsent largement la nouvelle du franchissement de la frontière irakienne par des bataillons noirs, ces nouvelles troupes d’élites turques. » 72 millions contre la violence 7.2 à Van », proclame un autre slogan.
« Silahlar (les armes) Van minute » titre aujourd’hui un article de Radikal (Van – Wan – se prononce « one » en kurde), – pastichant la célèbre sortie de Tayyip Erdogan à Davos. Et les médias relèvent aussi que ces dernières 48 heures, il n’y a eu aucune attaque du PKK contre les forces de l’ordre. Pas de nouvelles arrestations non plus dans les milieux proches du BDP. Encore trop tôt pour parler d’une véritable trêve, mais déjà suffisant pour être relevé comme un signe. Face au malheur qui frappe la région de Van, l’heure n’est peut etre pas à la violence.
Toutes les solidarités qui s’expriment montrent une fois de plus que ce n’est pas plus une religion commune (l’islam sunnite) introuvable, qu’une langue commune (le turc – au prix de la disparition des langues minoritaires), qui fonde le sentiment d’appartenir à une même communauté. Ça se situe ailleurs.
Et ce qui est valable pour la Turquie, l’est tout autant pour la France. Rien de plus crétin que la fameuse campagne destinée à fonder un sentiment d’unité nationale sensé avoir disparu que les Français ont du subir il y a quelque temps, et qui sous couvert de laïcité semblait surtout vouloir prouver qu’on ne pouvait se sentir Français que si on n’était pas musulman… De la devise française Liberté, Égalité, Fraternité, les géniaux concepteurs de cette campagne n’avaient retenu que le mot « égalité », réduit à une sinistre « uniformité »sensée sans doute transcender le sentiment de plus en plus ressenti de l’accroissement des inégalités. Pas étonnant qu’elle ait été un flop et ait suscité au contraire un profond ras le bol dans une large fraction de la population.
Quand j’étais revenue en France après plusieurs années passées dans la région Pacifique, j’avais été frappée par une impression de morosité et de sécheresse ambiantes. Le sentiment de vivre dans un pays déprimé n’a fait qu’empirer depuis le début des années 2000. Et j’ai l’impression que la montée de l’individualisme, le délitement des solidarités et les poussées d’autoritarisme pourraient être une des causes principales de cet état.
On a quand même souvent eu le sentiment ces dernières années, que le pays ne devrait s’en sortir qu’en se montrant plutôt méchant et arrogant, et en montant les Français les uns contre les autres : Ceux qui se lèvent tôt, contre ceux qui se couchent tard, fonctionnaires contre employés du secteur privé, banlieues populaires contre banlieues chics et centres ville yuppies , transnationaux contre Auvergnats de pères en fils, super actifs et laborieux brandissant le poids de leur labeur comme un étendard contre rêveurs, fumeurs contre mâcheurs de chewing-gum, vieux contre jeunes, etc…etc…
Et les traders de Neuilly ont beau partager la même valeur fric avec certains loulous encapuchonnés de banlieues nettement moins chics, on ne peut pas dire qu’ils se sentent solidaires les uns des autres.
En Turquie, où les solidarités restent plus fortes, mais les tensions sont aussi plus vives, notamment ces derniers temps, un tremblement de terre de magnitude 7.2 semble réussir ce dont la classe politique se montrait incapable.
Mais pourquoi son gouvernement AKP a-t-il cru bon de refuser l’aide internationale qui s’était spontanément proposée en arguant que la Turquie pouvait s’en sortir seule ? Depuis quand accepter la solidarité internationale serait faire preuve de faiblesse ? Et la refuser une preuve de puissance ? Et surtout était-ce bien le moment de vouloir prouver au reste du monde qu’on serait devenu assez grand pour pouvoir se passer des autres ?
Le dernier bilan fait état de 366 tués au moins, de 1301 blessés et de 2262 bâtiments effondrés, par le séisme du 23 octobre à Van-Erçis
Ajout du 26 octobre : La Turquie vient d’accepter l’aide internationale offerte. Il y a un besoin urgent de materiel notamment de tentes a Van. Ceux qui se sont rendus sur place parlent de chaos et désorganısation dans la distribution de l’aide aux sinistrés. Le dernier bilan provisoire annonce plus de 460 tués.
…et 4 soldats ont ete tués par une mine vers Baskale tandis que les operations nilitaires s’intensifient. Pas de treve des armes dans la province donc. Et apparemment sur le terrain les tensions entre AKP et BDP ont compliqué les choses.